En savoir plus sur la reception contractuelle en droit immobilier

> La notion de réception

La réception est la traduction juridique du contrôle opéré spontanément par toute personne qui obtient la livraison d’un bien ou d’un travail dont elle avait passé commande.

C’est l’occasion pour l’acquéreur d’élever des protestations contre certains défauts de la fourniture ou du produit. Il peut alors demander au fournisseur de les corriger.

En revanche, une fois le produit réceptionné, c’est-à-dire accepté après contrôle, les vices apparents qui n’ont pas été constatés ni relevés lors de cette réception ne sont plus couverts et le fournisseur n’est plus dans l’obligation d’y remédier.

La réception est une notion empirique, née de la pratique de la vente :

– celui qui achète examine la marchandise avant de l’accepter. Il peut éventuellement formuler des réserves.

– l’acceptation montre que le vendeur a bien rempli son obligation. Il peut alors exiger le paiement complet de la marchandise.

> La réception de l’ouvrage immobilier

Le concept de réception s’est développé en lien étroit avec les nécessités et les usages professionnels, variant selon les besoins liés à chaque type de vente. Par exemple : l’« agréage » pour la vente de vin avec dégustation préalable, la  « recette » en matière informatique… C’est certainement cette casuistique qui explique que la réception ne fasse pas l’objet d’une définition légale générale.

Cependant, devant la complexité de certains contrats et particulièrement des contrats d’entreprise en matière de construction, une loi 78-9 du 4 janvier 1978 propose une définition de la réception (Code Civil, article 1792-6 et Code de la Construction et de l’Habitation).

La réception est l’acte par lequel le maître d’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut, judiciairement. Elle est en tout état de cause prononcée contradictoirement.

Cette définition énonce les diverses caractéristiques de la réception au titre d’un marché.

> Les caractéristiques de la réception au titre d’un marché

Caractéristique n° 1 : Acceptation par le maître d’ouvrage

La réception constitue une étape dans l’exécution d’un contrat dont la prestation caractéristique est la fourniture d’un ouvrage.

Il s’agit pour le maître d’ouvrage de libérer le constructeur de son obligation de livrer une chose conforme aux dispositions contractuelles en reconnaissant cette conformité. La conformité ne peut pas se constater par de simples observations extérieures, il convient de procéder à des essais.

Caractéristique n°2: Réserves éventuelles

Lors de la réception (même tacite), le maître d’ouvrage peut formuler des réserves.

Il entend ainsi accepter l’ouvrage, mais il repousse son agrément définitif à la correction de certains défauts constatés lors de la réception, ou des essais le cas échéant.

Les réserves doivent porter sur des vices de conformité provoqués par :
– le non respect des exigences contractuelles du maître d’ouvrage
– le non respect des règles de l’art du constructeur.

Il s’agit donc pour le maître d’ouvrage d’obtenir, lors de la levée des réserves, un produit conforme à ce qu’il pouvait légitimement attendre lors de la signature du contrat.

Pour prévenir les abus des acquéreurs, les réserves soulevées doivent toujours être suffisamment précises et circonstanciées.

Si ces conditions sont respectées, le constructeur a l’obligation d’apporter les corrections demandées. Cette obligation relève de l’exécution du contrat initial.

Sauf dispositions légales, il revient aux parties de déterminer les conséquences réciproques de l’existence de réserves : temps dont dispose le constructeur pour lever les réserves, pénalités éventuelles, termes de paiement, etc…

Quoiqu’il en soit, tout ce qui ne fait pas l’objet de réserves est réputé accepté. Le maître d’ouvrage ne pourra donc pas exiger par la suite de la part du constructeur des réparations ou modifications portant sur des éléments n’ayant pas été retenus dans les réserves.

Caractéristique n° 3 : Acte unilatéral

La définition légale rappelle que la réception est un acte juridique qui exprime la volonté de l’acquéreur ou maître d’ouvrage d’accepter le bien livré.

L’acceptation, qui découle d’un contrôle du produit par le maître d’ouvrage, est donc formalisée par l’acte de réception. C’est cet acte qui permet de libérer le constructeur et qui entraîne toutes les conséquences de l’acceptation.

En tant qu’acte juridique, la réception exprime le consentement de son auteur.

Si ce consentement est vicié, c’est-à-dire s’il est fondé sur une erreur ou forcé par une manœuvre frauduleuse, il peut être annulé par un juge.

Il est donc très important de comprendre que la réception doit avant tout exprimer une volonté non équivoque d’accepter le bien.

C’est un acte unilatéral, qui n’engage donc qu’une personne, même si ses conséquences touchent chaque partie et que l’acte doit être établi de façon contradictoire.

Enfin, parce que c’est une obligation pour l’acquéreur de procéder à la réception, celui-ci ne doit pas la repousser de façon abusive.

C’est pourquoi, la jurisprudence est assez favorable aux constructeurs dans ce domaine :

– Une réception tacite peut être reconnue par le juge, l’acte unilatéral découle alors des circonstances qui expriment suffisamment la volonté de recevoir.

– Le maître d’ouvrage peut être condamné à payer des dommages-intérêts pour le préjudice que son refus abusif de réceptionner a pu causer au fournisseur.

L’article 1792-6 prévoit également qu’une partie peut demander au juge de prononcer une réception judiciaire.

En toutes hypothèses, des clauses contractuelles relatives à la procédure de réception peuvent limiter ces difficultés.

Caractéristique n° 4 : Acte contradictoire

Le caractère contradictoire de la réception est imposé par l’article 1792-6 du Code Civil.
Il est en outre rappelé de façon constante par la jurisprudence qui y est très attentive.

On peut caractériser ainsi la contradiction :

– L’acquéreur doit être personnellement présent.

Remarque : Si l’acquéreur confie la mission de la réception à une autre personne (ex : pour une construction, un maître d’œuvre, l’architecte, voire l’entrepreneur lui-même…), cette dernière doit être dûment habilitée à cet effet, avoir reçu mandat spécial ou être délégué. Faute de remplir cette formalité, le maître d’ouvrage pourra être tenu responsable des irrégularités éventuelles de la réception, ou subir les conséquences d’une mauvaise appréciation des réserves…

– Le fournisseur doit être présent ou avoir au minimum été informé.

Si un écrit est établi, le caractère contradictoire peut être prouvé par la signature du maître d’ouvrage et le visa du constructeur.

En cas de réception tacite, la preuve découlera des circonstances.

Faute de contradictoire, l’acte est inopposable à la partie qui n’a pas été au moins avertie de la réception.

En cas de résistance d’une partie, mieux vaut donc faire appel au juge pour qu’il constate une réception tacite ou ordonne la réception judiciaire, plutôt que de passer outre en oubliant le caractère contradictoire.

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